Quelle est la dimension nucléaire du conflit ?
Elle se décline principalement autour de deux axes. D’une part, un enjeu autour de la sécurité des centrales nucléaires dans les zones de conflit. Ce problème est suivi par l’Agence internationale de l’énergie atomique. D’autre part, un enjeu autour du statut de la Russie, à savoir un État doté d’armes nucléaires. Depuis le début de l’invasion, le Kremlin l’a régulièrement rappelé à travers des déclarations de haut niveau, à la fois politiques et militaires, y compris présidentielles.
À quelles déclarations faites-vous allusion plus précisément ?
Il y a de nombreux exemples. J’en citerai deux qui ont accompagné le début de l’invasion. Vladimir Poutine a alors brandi la menace nucléaire en avertissant que tout État qui entraverait les actions de la Russie devrait faire face à des conséquences jamais vues dans l’Histoire. Par ailleurs, lors d’une mise en scène filmée, il a ordonné à son ministre de la Défense et au chef d’état-major des armées de rehausser le niveau d’alerte des forces de dissuasion. Cette rhétorique nucléaire et ces discours offensifs s’inscrivent dans une stratégie plus globale d’intimidation.
De manière plus générale, quels sont les grands principes de la doctrine nucléaire russe ?
Pour faire référence à la doctrine nucléaire russe, il convient de s’appuyer sur les éléments qui ont été rendus publics. Le dernier document officiel publié date de juin 2020. Dans ce dernier, les principes généraux énoncés indiquent que les armes nucléaires pourraient être employées dans deux types de cas :
- l’utilisation d’armes nucléaires ou d’autres types d’armes de destruction massive contre la Russie et/ou ses alliés ;
- une agression contre la Russie au moyens d’armes conventionnelles qui menaceraient son existence même. Cette notion « d’existence même de l’État » est importante. Elle suggère que le recours à l’arme nucléaire se place à un niveau stratégique et politique.
Cette doctrine ne s’applique donc pas dans le cadre de la crise ukrainienne ?
Le signalement nucléaire russe dans le cadre de l’invasion de l’Ukraine peut paraître en décalage par rapport à cette doctrine. Il s’inscrit dans une stratégie d’intimidation.
Retrouvez cette interview sur le site du ministère des Armées : https://bit.ly/3Z1JsKj