Le rapprochement inattendu entre l’Éthiopie et l’Érythrée au cours de l’été 2018 a été l’un des revirements les plus spectaculaires des relations internationales de ces dernières années. L’Érythrée, qui s’est arrachée de l’Éthiopie à l’issue d’une guerre de libération nationale de trente ans (1961-1991), lui a refait la guerre en 1998-2000 et maintenait depuis un état de « ni guerre, ni paix ». Le régime s’est entièrement construit contre l’Éthiopie. Celle-ci a toujours été l’alibi commode du totalitarisme d’Issayas, qui pouvait justifier par la menace existentielle éthiopienne un certain nombre de mesures liberticides, dont le service national à durée indéterminée qui a contribué à faire fuir beaucoup de jeunes. Or, en l’espace de quelques mois, les ennemis jurés sont devenus des « frères », voire « un même peuple », et ont signé un accord de paix. Comment ? Pourquoi ? Et quelles en seront les conséquences probables ? Cette note tente d’expliquer ce rapprochement éclair en explorant les motivations de chacune des parties et le rôle des parrains régionaux. Elle en tire les conséquences, sur la politique intérieure érythréenne, la stratégie portuaire éthiopienne, les équilibres régionaux et les liens avec la communauté internationale. Enfin, elle élabore cinq scénarios sur l’évolution du régime érythréen, qui est la clé de cette nouvelle donne.
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